Lire Les Carnets du loir consacrés à Thomas B. Reverdy
Thomas B. Reverdy est né en 1974 et a passé une enfance heureuse.
Au cours de ses études de lettres à l'université, il travaille sur Antonin Artaud, Roger Gilbert-Lecomte et Henri Michaux.
Il participe aussi à cette époque à la revue La Femelle du requin, dont il dirige la publication du numéro 4 au numéro 12.
Il obtient l'agrégation de lettres modernes en 2000.
Il enseigne depuis dans un lycée de Seine-Saint-Denis, le lycée Jean Renoir.
Il est l’héritier d’un grand-père ingénieur qui a offert ses services à de grands noms comme Le Corbusier et qui lui a légué des milliers de pages d’une lettre de « souvenirs et réflexions
que lui inspiraient la marche du monde » et d’une mère professeur d’économie politique qui l’a quitté trop tôt alors qu’il n’avait que 19 ans. Ces trois premiers romans publiés aux éditions du
Seuil « racontent les errances du souvenir, le deuil, l’amitié aussi. » Son dernier roman,L’Envers du monde, publié au Seuil, se présente sous la forme d’un roman noir dont
l’intrigue se déroule sur le chantier de Ground Zero, à New York.
La Montée des eaux, Seuil, septembre 2003.
Dans ce roman, les chapitres alternent entre un “je” et un “il”, dont on apprendra incidemment qu’il se prénomme Thomas.
Dans la distance de la troisième personne se dit la douleur de la perte, celle d’une mère trop tôt emportée par la maladie. Sous un ciel de tempête et d’orage, le personnage contient ses pleurs mais laisse sa peine se diffuser à travers souvenirs et maison abandonnés.
En miroir, celui qui parle à la première personne s’engage, entre deux gueules de bois, dans une relation amoureuse avec Éléonore, dont la disparition révélera qu’elle était le reflet diaphane d’un autre amour. Dans ce dédoublement, l’amour se dit, au-delà du drame.
Une sobre mélancolie se dégage de l’écriture soucieuse du détail, de l’amplitude des phrases bien cadencées et des participes présents, qui rendent sensible ce qu’elle décrit.
Le Ciel pour mémoire, Seuil, septembre 2005.
“Il se demandait pourquoi, dans le premier des livres que contient la Bible, il semble à plusieurs reprises que Dieu se soit trompé dans sa création, et détruise tout, et recommence, il se demandait pourquoi et, cependant, c’était sur le point de lui arriver aussi.” (Première phrase du Ciel pour mémoire)
Si dans le premier roman, le narrateur cherchait à “retrouver (son) adolescence, même en forme de ruines, gratter la terre, (...)”, celui du Ciel pour mémoire oriente différemment son regard. Alors que l’eau menaçait d’ensevelir le monde et la mémoire, ici, c’est le ciel et ses constellations qui ouvrent l’espace.
Il y est à nouveau question de disparition, celle de Guillaume. Et l’éclipse de l’ami d’enfance inaugure la rupture avec le passé qu’il a peuplé. Les trois parties du roman nous conduisent de New York en France rurale, en passant par Rome. Chaque étape est un adieu à l’adolescence.
Cette fois, une seule voix — celle du narrateur — constate le parcours du disparu. Et l’écriture de permettre de s’arrêter sur des détails, de faire durer l’instant, de préserver l’éphémère.
Alors qu’enfants, Guillaume et le narrateur cartographiaient le ciel, réinventaient les noms et le monde, l’âge adulte semble n’être rien d’autre que celui du constat du monde tel qu’il nous est laissé.
Les Derniers Feux, Seuil (2008)
Les Derniers Feux est le troisième roman de Thomas B. Reverdy ; après La Montée des eaux et Le Ciel pour mémoire, il clôt brillamment un triptyque dédié à l'introspection et à
l'émouvante éclosion d'un jeune écrivain.
Thomas, le narrateur, apprend par voie de presse le décès de son père. En vacances dans sa maison de famille, avec sa compagne, son fils et ses amis – cette solide famille qu'il s'est
construite luimême au fil des années – il décide de se rendre à l'enterrement en voiture : c'est la folle équipée !
Au cours de ce voyage, au gré de ses souvenirs épars, Thomas reconstruit sa vie passée tout en roulant vers l’orée de sa nouvelle vie en compagnie de ses proches.
L’écriture de Thomas B. Reverdy est une musique virtuose qu’on retrouve avec plaisir. Ses belles phrases, longues et sinueuses, prennent le temps de guider le lecteur dans des recoins
sensibles inattendus.
Et, au bord de la mer, face à l’immensité de la vie qui s’offre au narrateur, la fin du roman est bouleversante.
Collection irraisonnée de préfaces à des livres fétiches, Intervalles (2009)
Thomas B. Reverdy a partagé avec Martin Page la direction de ce collectif d’écrivains pour nous faire vivre l’histoire particulière qui lie chacun d’entre eux à un livre.
« Fétiches » pour les avoir rêvés dans leur enfance, pour les avoir fait grandir pendant leur adolescence, pour les avoir poussés à écrire ou parce qu’ils ont été, par hasard, à l’origine
d’un souvenir singulier, ces livres sont parfois rares ou méconnus. Il ne faut pas y chercher une bibliothèque idéale, la liste des livres indispensables pour ce qu’ils ont apporté à la
littérature mais pour le bonheur qu’ils ont donné à ces lecteurs-auteurs et pour celui qu’on cherche à nous faire partager.
Avec Jakuta Alikavazovic, Philippe Besson Jean-Philippe Blondel, Patrick Boman, Philippe Bonilo, Geneviève Brisac, Arnaud Cathrine, Kéthévane Davrichewy, Roxane Duru, Olivia
Elkaim, Dominique Fabre, Philippe Forest, Paul Fournel, Vanessa Gault, Jean-Baptiste Gendarme, Valentine Goby, Patrick Goujon, Elizabeth Guyon Spennato, Theo Hakola, Thierry Hesse, Stéphane
Heuet, Stéphanie Hochet, Thierry Illouz, Nathalie Kuperman, Cécile Ladjali, Marie-Hélène Lafon, Jérôme Lambert, Diane Meur, Nicolas Michel, Marc Molk, Dominique Noguez, Sébastien Ortiz, Véronique
Ovaldé, Martin Page, Aude Picault, Thomas B. Reverdy, Cécile Reyboz, Laurent Sagalovitsch, Laurence Tardieu, Jacques Tournier, Sylvain Venayre, Emmanuel Venet, Hélèna Villovitch et Carole
Zalberg.
L’Envers du monde, Seuil (2010)
Dans ce quatrième roman, Thomas B. Reverdy rompt de façon radicale avec l'univers littéraire de ses trois premières publications qui formaient un triptyque où l'introspection et l'éclosion
de la vocation d'écrivain étaient les principaux enjeux.
Cette fois-ci le récit s'installe à New York, précisément aux alentours de « Ground Zero », à l'emplacement du World Trade Center.
Dans ce lieu en perpétuels travaux se croisent plusieurs personnages : O'Malley, le commandant de police, Candice, la serveuse, Pete, l'ancien policier raciste ou encore Simon, l'écrivain
français. Un événement macabre rend ces personnes suspectes ou témoins : un ouvrier arabe a été retrouvé dans un puits de forage, visiblement assassiné. Dans la tradition des grands romans
américains, l'auteur opte pour un récit polyphonique. Grâce au point de vue des différents personnages, le lecteur accède à une peinture contemporaine remarquable de la société américaine, encore
meurtrie par les attentats du 11 septembre 2001. Un roman singulier et passionnant !
Autres textes de Thomas B. Reverdy :
Le Lycée de nos rêves, avec Cyril Delhay, Hachette Littérature (2008).
Nombreuses fictions, critiques et illustrations dans la revue de La Femelle du requin qui a pour objet l'édition de textes de création et de lectures critiques sur la littérature
contemporaine (1996-2004).
Liens :
- belle critique sur La Montée des
eaux.
- premiers textes de Thomas Reverdy publiés dans la revue La femelle du requin.